Créée en 2017, VFX Workshop est une école située dans le XVème arrondissement de Paris qui forme aux métiers principalement des VFX et de l’animation 3D. Elle vient d’intégrer le RECA qui compte donc désormais 34 membres. Rencontre avec son fondateur et directeur : Renaud Jungmann.
1 ) Pourquoi avoir créé VFX Workshop ?
J’avais créé la filière animation à LISAA en 1999. A la fin de ma collaboration avec cette école, 16 ans plus tard, différents rapports – dont ceux de Jean Gaillard et René Broca – et conférences professionnelles suggéraient qu’une formation en 3 ans (et non 5) pouvait suffire. J’étais plutôt sensible à cette hypothèse qui proposait un lien plus direct entre étudiants et studios, et qui prenait aussi en compte les questions du coûts des études, de l’endettement des étudiants et du contenu des formations.
J’avais aussi envie de proposer un enseignement différent parce que les techniques avaient évolué : avec les nouveaux outils, il n’était plus obligatoire de commencer par l’enseignement artistique. On pouvait commencer directement par l’ordinateur. L’idée était donc d’apprendre aux étudiants à fabriquer des choses le plus tôt possible avec un ordinateur !
En 3ème lieu, j’avais envie de faire évoluer les différentes notions traditionnelles pour les pratiquer directement sur l’outil.
2) Pouvez-vous en quelques mots présenter votre école ?
Ce sont ces 3 objectifs qui ont abouti à la création du programme original proposé par VFX Workshop : une dizaine d’outils manipulés dès la 1ère année, l’apprentissage d’un pipeline, la possibilité de fabriquer des trucages, des effets spéciaux au travers de très nombreux exercices.
En 2ème année d’autres logiciels sont abordés. Ils permettent d’acquérir de nouvelles compétences dont la simulation dynamique, ce qu’on appelle les « FX ». Les étudiants vont apprendre à déléguer à l’ordinateur les choses lourdes à réaliser manuellement. La motion capture est intégrée en fin de 2ème année, avec une expérience en studio.
L’enjeu de ces 2 ans est de démystifier tous ces outils, montrer qu’ils sont abordables, amener les étudiants à les mettre en œuvre de manière progressive et surtout les appréhender non pas individuellement mais comme des maillons d’une chaîne de fabrication complexe.
En 3ème année, les étudiants sont accompagnés pour passer la certification (en cours) de l’école : ils vont travailler soit individuellement soit collectivement sur un case-study. Pour commencer, ils définissent un cahier des charges semblable à celui que pourrait leur présenter un réalisateur. Ils vont ensuite proposer plusieurs solutions puis les mettre en œuvre avec une approche de Directeur Technique.
3) A quels métiers formez-vous vos étudiants ?
Les étudiants qui viennent chez nous sont attirés principalement par l’univers des effets spéciaux. Dans le sens le plus large du terme : effets visibles, invisibles, spectaculaires ou au contraire extrêmement intégrés dans l’image. Aussi bien en images réelles qu’en animation.
On aura aussi bien des profils pipeline que des techniciens FX, des grooming artistes, des sculpteurs, des spécialistes de la motion capture…
Nos étudiants s’adressent aux 3 grandes industries de notre domaine : l’animation 3D, les effets spéciaux et, en marge, le jeu vidéo.
Certains étudiants arrivent à l’école en étant déjà très éclairés sur le milieu et en sachant déjà ce qu’ils veulent faire. D’autres sont encore en phase de découverte : ils peuvent arriver avec une sensibilité plus artistique et tout à coup se passionner pour l’outil ! Et vice versa.
Nous essayons toujours d’encourager les jeunes à explorer un maximum de pratiques et de ne pas s’arrêter aux premières choses qu’ils découvrent. Souvent, un étudiant qui découvre la sculpture numérique ou la numérisation 3D ne veut plus faire que cela ! Il faut réussir à lui donner envie de continuer de découvrir d’autres technologies.
4) Sur quels éléments principaux sélectionnez-vous vos étudiants ?
Pour constituer une classe de 25 à 30 élèves, nous allons recevoir, individuellement, entre 40 et 50 étudiants. Au cours de cet entretien, qui dure entre 1h et 1h30, certains comprennent que notre pédagogie ne va pas leur convenir. Ceux qui restent ont bien saisi qu’ils allaient apprendre les choses techniquement. Ils doivent avoir envie d’expérimenter les outils. Leur curiosité les pousse à comprendre comment se fabriquent les choses. Ils sont souvent déjà intéressés par différents types de technologies, de logiciels. C’est par période ! Tout à coup un logiciel qui a percé dans les réseaux sociaux devient très à la mode. Il faut essayer de le relier à quelque chose de cohérent.
Les candidats sont principalement des bacheliers. Certains viennent d’autres écoles d’animation et souhaitent compléter leurs parcours. Les autres ont pu déjà suivre un premier parcours qui n’a rien à voir avec la 3D ou les VFX.
Avant toute chose, nous essayons de repérer des personnes qui ont une vraie envie de travailler sur un ordinateur. Peu importe le profil, qu’il soit technique, scientifique, littéraire, artistique… En revanche, il faut que la personne soit assez rigoureuse et organisée.
Pendant l’entretien, nous allons voir d’où vient le candidat, ce qu’il a fait, ce qu’il a testé, ce qu’il comprend…. Le travail commence à ce moment-là ! Nous cherchons à le rendre curieux des productions, des métiers possibles, des entreprises du secteur… Pour déjà se projeter après l’école. Je n’ai pas envie qu’il vienne chez nous « par hasard » !
5) Que change pour vous le fait d’avoir intégré le RECA ?
Avant tout, si je tenais à ce que VFX Workshop intègre le RECA, c’est parce que j’avais personnellement participé à sa création. Ce qu’il y a de fantastique dans ce réseau, c’est le nombre d’écoles qui le constituent et la philosophie avec laquelle chacune d’elles mène son enseignement. Les échanges, très vertueux, que les écoles ont pu avoir entre elles au sein du RECA ont permis d’appuyer certains axes de travail. D’aller chercher des réponses, des collaborations…
Quand j’ai créé VFX Workshop, j’avais cela en tête. Il est évident qu’intégrer le RECA c’est être au plus proche des écoles phares du secteur et cela crée une émulation. Cela nous aidera forcément à faire évoluer le fonctionnement et la pédagogie de l’école.
Devenir membre du RECA permet de participer à des groupes de travail, de s’investir auprès des professionnels. C’est aussi mieux communiquer sur ce qui se passe dans les écoles non seulement auprès des parents ou des futurs étudiants, mais aussi vis-à-vis de l’ensemble du secteur.
L’annonce récente de la labellisation du RECA est une très bonne chose. Historiquement, le RECA avait été fondé, à l’initiative du CNC, d’une part pour cartographier les offres de formation mais aussi pour fédérer des forces. L’idée était de faire en sorte que le travail fourni dans les écoles du RECA continue d’être le meilleur possible. Les formations françaises rayonnent à l’international. Tout le monde reconnait la qualité des enseignements et leur « ancienneté » leur donne une envergure particulière, en ayant notamment formé plusieurs têtes d’affiche de l’animation. Il faut continuer d’entretenir cela. Et aussi de forger de nouvelles missions pour continuer de garantir l’excellence des formations proposées par les écoles du RECA.
6) Votre école affiche sa « coloration » VFX au sein d’un réseau majoritairement axé vers l’animation. Quelles sont selon vous les principales différences entre ces 2 secteurs ?
Pour moi il n’y a pas véritablement de différences entre ces 2 secteurs. L’un et l’autre utilisent les mêmes outils mais avec des méthodes différentes. Et à des fins légèrement différentes. Dans les années 80, on a commencé à utiliser l’infographie 3D pour simuler la lumière, simuler la géométrie, représenter le volume… De fil en aiguilles, des gens ont pensé qu’on pourrait peut-être faire des effets spéciaux avec ces outils. Et truquer des images. Au début ça a débouché sur du matte painting digital, du montage numérique. On a assisté aux premiers pas du compositing qui mélangeait plusieurs sources. De là est venue l’idée qu’au lieu d’utiliser des marionnettes ou des costumes pour représenter un dinosaure ou n’importe quelle créature, on pouvait le représenter en pieds sans avoir ensuite à effacer des supports et l’animer avec ces techniques d’animation. C’est comme ça qu’est née la 3D. Et c’est comme ça que l’outil s’est développé. L’esthétique et les esprits ont ensuite évolué. Et aujourd’hui tous les outils numériques sont communément utilisés. Mais je me souviens d’une époque où le Festival d’Annecy refusait des œuvres créées à partir d’ordinateur au prétexte que c’était « de la triche ! »….
7) Quels sont vos ambitions ou projets pour VFX Workshop ?
Nous avons en cours l’enregistrement de notre titre au RNCP. Nous en attendons la confirmation très prochainement. Parallèlement, nous souhaitons développer encore nos liens avec les studios. Échanger avec eux sur leurs attentes en matière de contenus enseignés pour les faire évoluer.
Nous voulons avant tout rester une « petite école ». C’est dans notre ADN ! Nous avons entre 24 et 30 étudiants par niveau. Cela nous permet d’avoir des échanges constants avec chaque étudiant. Nous pouvons ainsi mieux les aider à évoluer dans leur parcours. Revenir individuellement sur des incompréhensions ou des difficultés. Il ne s’agit pas uniquement de ce qui se passe à l’intérieur de l’école. Nos étudiants nous nourrissent aussi de ce qu’ils apportent de l’extérieur. L’aspect humain reste au cœur du travail de transmission de nos 22 enseignants.
Contact : Renaud Jungmann – VFX Workshop – Paris – Tel : 06 61 16 19 98 – E-mail : contact@vfx-workshop.com – Site web : www.vfx-workshop.com