La 15ème édition du Festival du Film Merveilleux et Imaginaire, qui se tient à Paris du 18 au 20 septembre, propose une fois encore d’ensorceler son public avec des sélections internationales de courts métrages aussi magiques que déroutants. Le RECA aura le plaisir d’intégrer le jury de cette édition anniversaire qui promet de belles découvertes. Rencontre avec Bénédicte Beaugeois, cofondatrice et directrice de l’évènement.
1) Quelle est pour vous la définition d’un “film merveilleux” ?
Pour moi, un film merveilleux rassemble les critères qui viennent des contes de fée, des fables. Il doit ramener à l’universalité et réunir les différents peuples. Tout en préservant la singularité de chaque pays. Un conte africain aura par exemple une singularité différente d’un conte français… avec cependant quelque chose de commun.
La technique du film intervient également comme une métaphore de cet aspect merveilleux. Ce sont des choses qui font appel à notre cerveau reptilien.
Les spectateurs s’identifient totalement au film. Encore plus lorsqu’il s’agit d’animation qui transcende vraiment les frontières. Et même si l’action se déroule dans un pays où ils n’ont jamais mis les pieds.
La musique joue également un grand rôle.
Les films merveilleux nous renvoient à l’onirisme : le rêve, le cauchemar… des choses parfois primitives, primales qui nous rassemblent car elles trouvent leur racine dans nos instincts les plus profonds.
Le film merveilleux a par ailleurs cette capacité de nous permettre de plus dialoguer. Le festival a un public très hétéroclite. Et pourtant les gens se parlent ! Alors que s’ils se croisaient dans le quotidien, ils ne se parleraient probablement pas !
2) Comment l’idée de créer un festival dédié à ce genre est-elle née ?
L’idée m’est venue quand j’étais encore étudiante en Production cinématographique à l’ESEC – une formation qui sur le papier ne menait pas du tout à l’évènementiel.
Mais au cours de mon stage de fin d’études, j’ai été envoyée au Festival de Cannes. Je me suis retrouvée au département Protocole. De là, je pouvais me balader un peu partout dans le Palais…. Et c’est comme ça que je suis tombée amoureuse de l’évènement ! Tout était génial. Et j’ai eu envie de faire pareil !
L’une de mes meilleures amies, Maureen Gerby, était quant à elle en études de cinéma à la Sorbonne.
Toutes les 2 nous avions du mal à trouver un premier job… C’est sans doute aussi une des raisons pour lesquelles nous avons tout de suite créer cet évènement car nous ne voulions pas rester sans rien faire !
Maureen et moi avons la fibre entrepreneuriale. Nous nous sommes donc retrouvées un jour autour d’une table à nous dire : « OK. Il faut faire quelque chose. On va créer un festival. Mais un festival de quoi ?! »…
Au départ, Maureen et moi voulions nous tourner vers l’animation. Mais nous voulions aussi aider les copains de nos écoles de ciné. Alors nous avons élargi le scope. Le festival accueille autant de films d’animation que de films en images réelles.
Nous avons décidé de rester sur du format court. Pour moi c’est le format de la liberté !
Les gens (souvent des jeunes) qui font du court métrage n’ont pas peur. Ils n’ont rien à perdre. Ils n’ont pas de pression politiques. Pas de pression commerciale.
Je vois aussi l’évolution depuis 15 ans. Je ne vois plus du tout les mêmes films. Ce ne sont plus les mêmes personnes qui les réalisent et cela se voit. Ce ne sont plus les mêmes générations. Les films sont beaucoup plus violents aujourd’hui.
3) Il s’agit d’un festival international. Quelle est la place de la France dans ce secteur ?
Aujourd’hui nous avons des films originaires de 36 pays issus des 5 continents !
Avec cependant une majorité de films français. C’est aussi un choix de notre part car nous tenons à la présence des réalisateurs pendant le festival et bien évidemment, c’est plus facile lorsqu’ils habitent ici. Cela dit, j’ai sélectionné cette année un film dont le réalisateur est iranien. L’un de ses producteurs est basé en Allemagne et devrait faire le déplacement. Et si j’arrive à obtenir un visa, l’une de se productrices locales devraient venir de Téhéran. Tous les ans, le festival reçoit des professionnels du monde entier.
Côté spectateurs, c’est aussi très varié. J’invite bien sûr mon réseau professionnel qui regroupe « un peu de tout ». Mais il y a aussi le grand public qui répond présent. Il s’agit majoritairement de jeunes, originaires d’un peu partout. Je les appelle les « touristes culturels ».
4) Accordez-vous une attention particulière aux jeunes talents ?
Bien évidemment ! Les films de fins d’études des écoles d’animation et de VFX nous intéressent tout particulièrement. Il y a tellement de talents. Et surtout en France ! Nous avons envie de les montrer. Nous travaillons principalement avec des agents distributeurs qui nous envoient des pré-sélections. Cela nous facilite le travail…
Mais j’aimerais beaucoup avoir plus de liens avec les écoles. Je pense qu’il y a des écoles que je ne connais pas et qui ne nous connaissent pas ! Et c’est vraiment dommage. Car les festivals sont un véritable outil de promotion pour les jeunes talents. Et pas seulement en France.
Nous proposons différentes récompenses (NDLR : Meilleur Film, Meilleur Film d’animation, Meilleur Scénario, Meilleure Musique, Prix du Jury, Prix de la Jeunesse, Meilleur Effets Spéciaux) et pour la 1ère fois cette année le Prix Impact SDG qui récompensera un film qui exploite la fantasy pour promouvoir les objectifs mondiaux de développement durable (environnement, égalité, échanges culturels).
En revanche, il n’y a pas de section uniquement dédiée aux films d’études. Ils sont en compétition avec les professionnels
5) Le festival fête cette année ses 15 ans. Quels seront les enjeux de cette édition ?
L’enjeu est d’accentuer nos échanges avec l’étranger. Le festival dure 3 jours à Paris mais nous rediffusons les sélections toute l’année partout dans le monde, notamment dans les instituts culturels français.
Je travaille déjà avec les alliances françaises et les instituts français mais j’aimerais faire encore plus de partenariats, avec plus de pays. Favoriser aussi les échanges de programmes entre les pays, possiblement hors France. Proposer par exemple des diffusions d’œuvres slovaques en Allemagne. Ou kazakh en Belgique ! Tout est possible. Il y a beaucoup d’enthousiasme chez les personnes que je rencontre. Et le cinéma permet de créer du lien. De faire venir des spectateurs dans les salles.
L’après COVID a été compliqué. Avec notamment un changement de salle pour notre évènement. Ce qui est toujours un peu stressant. Dès que possible, j’aimerais aussi relancer les activités éducatives sous forme d’ateliers comme nous le proposions avant.
Site web : https://festival-film-merveilleux.com/