Interviewé il y a 4 ans pour e-RECA avec d’autres camarades de promo à propos de leur film de fin d’études, Dinosaurs : The True Story, Vasco Potier évoquait déjà l’envie qu’il avait, en sortant de l’école, de créer un studio d’animation, possiblement avec ses acolytes. Quelques années plus tard, son rêve est en partie réalisé puisqu’il a fondé, avec Paul-Louis Aeberhardt, le studio Some Stuff, basé à Montrouge. Retour sur le parcours d’un entrepreneur dans l’âme.
1 ) Quel a été votre parcours personnel avant de créer Some Stuff ?
J’ai toujours été intéressé par les arts plastiques, même si je ne dessinais pas forcément très bien, j’aimais surtout bricoler. Créer des choses avec mes mains. En classe de terminale section « sciences de l’ingénieur », j’ai découvert les outils 3D. J’avais téléchargé Blender, Adobe… Je m’amusais, comme tous ceux de ma génération, à fabriquer des vidéos. Après le bac, j’avais décidé de m’orienter vers une école d’animation. J’en ai visité plusieurs avant de me décider pour l’IIM (Institut de l’Internet et du Multimédia) qui, en 1ère année, proposait un tronc commun de différentes matières (web, 3D, jeu vidéo, communication visuelle et digitale…) – le choix de la spécialisation se faisant à l’issue de cette année de découverte. J’ai ensuite suivi la filière 3D jusqu’en 5ème année.
Pendant mes études, j’ai effectué un 1er stage dans un garage de concept car où je modélisais des créations de voitures. Puis un 2ème stage en 3ème année comme généraliste chez Mac Guff pour qui j’ai continué de travailler parallèlement en 4ème et 5ème années.
En sortant de mon mastère, j’ai travaillé sur différents postes pour plusieurs petits studios mais aussi surtout pour Mac Guff pendant environ 1 an. Puis Mikros, pendant 1 an et demi, comme lighting artist sur le long-métrage, Ozi, la Voix de la Forêt (ndlr : sortie en France le 25 avril 2025), avec notamment Paul-Louis Aeberhardt, un ancien de l’IIM avec qui j’avais travaillé pour notre film de fin d’études, Dinosaurs : the True Story, et avec qui, surtout, j’ai ensuite créé Some Stuff.
2) Quand, comment et pourquoi avoir créé Some Stuff ?
Je viens d’une famille d’entrepreneurs ce qui explique peut-être que l’idée de créer ma propre structure a toujours été présente. Lors de ma 4ème année d’études, devant le jury de fin d’année, j’avais évoqué l’idée de monter une boîte. Des amis de promo venaient me dire qu’ils seraient partants eux aussi … C’était vraiment devenu mon objectif. Tout en me disant qu’il fallait que je prenne le temps, d’une part d’acquérir de l’expérience ailleurs, d’autre part de bien préparer les choses. Nous étions quand même tous encore très jeunes à l’époque.
L’idée était un peu restée en suspens jusqu’à ce que Paul-Louis revienne vers moi, après une discussion qu’il avait eue avec son père, en me disant qu’il fallait absolument que l’on monte quelque chose ! Et c’est le COVID qui a accéléré le projet. A la sortie du confinement, je m’étais installé chez Paul-Louis où j’avais aménagé un bureau avec des machines pour travailler. On travaillait tous les 2 chez Mikros sur des postes différents. Tous les soirs on parlait de la boîte, de ce qu’on voulait en faire… Nos envies et expériences se complétaient. Nous avons donc décidé de créer la société à la fin de nos contrats respectifs.
Avant d’attaquer vraiment, je me suis donné 3 mois pour mettre à plat tout ce que je pouvais avoir encore en cours et surtout prendre quelques vacances…
Pour que la boîte puisse démarrer en septembre, il y avait 3 enjeux majeurs : trouver un local, trouver un client, trouver des machines !
En juin 2022, j’avais un local.
Pour les machines, j’ai pu profiter d’un renouvellement de matériel de l’IIM et acheter 10 ordinateurs en accord avec l’école.
Pour ce qui est du client, un de mes contact nous a donné un 1er gros projet : cela a sonné le coup d’envoi de la création officielle de Some Stuff.
3) Comment présenter Some Stuff ?
Paul-Louis et moi avons des expériences complémentaires en animation, pub et documentaire. Dès le début, nous avons voulu garder un positionnement généraliste. Si nous nous appelons Some Stuff, c’est bien parce que nous voulions faire plein de choses ! Avec ce côté « débrouillard » que nous avons depuis l’école. Some Stuff est une entreprise toute jeune créée par des jeunes. On ne pourrait de toute façon pas concurrencer des Mac Guff ou des Mikros !
Aujourd’hui, nous faisons de la pub : pour Renault, Schwarzkopf, Orange, pour des marques de luxe notamment en horlogerie, parfum et automobile, pour des réseaux sociaux… Nous sommes aussi présents sur l’évènementiel.
Et dans le documentaire qui représente une grosse partie de notre activité. Sur ce segment, nous fabriquons des VFX, des plans en 3D. Parmi nos plus gros clients, il y a RMC Découverte. Et nous espérons très bientôt signer avec d’autres diffuseurs majeurs.
Nous aimerions développer une activité VFX pour le cinéma, et surtout de l’animation en séries TV. Nous avons déjà mis en place un pipeline innovant en interne que l’on pourra faire évoluer selon les besoins de futurs clients. Et bien sûr, à terme, proposer un jour nos propres créations.
4) Quelles ont été les plus grandes difficultés ? Et les plus grandes satisfactions ?
La plus grosse difficulté, celle qui nous crée nos plus grandes angoisses, c’est de signer des projets… Les projets apportent de belles images et les belles images apportent des projets. Il faut toujours penser à faire rentrer de l’argent ! Vient ensuite le stress de former les bonnes équipes. J’ai l’impression qu’être entrepreneur est synonyme de n’être jamais content, de toujours vouloir faire mieux.
Le chemin de la création d’entreprise n’est pas toujours évident. On part plein d’enthousiasme et de grandes idées… Et puis on se heurte à la réalité de la vie, parfois pour le meilleur mais aussi pour le pire. J’ai l’impression que c’est cyclique. Que l’on passe en permanence de l’espoir au désenchantement…et vice versa. Il faut toujours s’accrocher.
Mais bien sûr, avoir monté sa propre boîte à moins de 30 ans est quand même très valorisant. Même si nous essayons de rester humbles et lucides sur l’avenir. Il n’est pas question pour nous de ‘’prendre le melon’’ !
Ma plus grande satisfaction reste le fait de travailler avec une super équipe. Cela peut sonner ‘’cliché’’ mais l’environnement de travail m’aide beaucoup à rester motivé et donner mon maximum. Des personnes incroyables sur des super projets divers et varié, c’est la grande satisfaction du studio.
Le fait de regarder derrière soi nous permet de toujours savoir d’où l’on vient et là où nous sommes. Nous étions 2 à la création et aujourd’hui, 12 artistes nous ont rejoints.
5) Quels conseils donner aux jeunes talents qui souhaiteraient tenter une expérience similaire ?
Avant toute chose, créer sa propre structure nécessite d’être mature. Savoir où se placer. Être graphiste pour un studio et gérer un studio sont 2 choses très différentes. Il ne faut pas se laisser dépasser par ses ambitions. Et surtout il faut se positionner comme des pros. Tout en restant conscients de son manque d’expérience face aux structures plus anciennes du marché.
Il nous a fallu 5 ans d’études avant d’entrer sur le marché du travail. A mon sens, il faut également entre 4 et 5 ans d’expériences minimum avant de monter une boîte. Et surtout ne pas hésiter à diversifier ses expériences : apprendre dans des gros studios, des plus petits…. Et aussi dans des « mauvais » studios ! Cela en dit beaucoup sur les erreurs à éviter !
Être entrepreneur est aussi une question de personnalité. Certains ne sont pas faits pour ça. Si l’on est très timides ou si l’on a besoin de sécurité dans son emploi pour s’épanouir, créer son entreprise risque d’être compliqué, même si rien n’est impossible !
6) Pouvez-vous nous parler des prochains projets de Some Stuff ?
Nous avons un nouveau projet avec RMC Découverte pour une série de 6 films sur l’Égypte des Pharaons qui devrait être diffusée en fin d’année. Au total, il y a environ 200 plans à livrer. Nous leur avons proposé une technique en temps réel très innovante pour la création de saynètes en images de synthèse qui illustrent ce que dit la voix off du film.
Une autre série, toujours pour RMC Découverte, est également en projet avec ce même pipe temps réel.
Nous avons par ailleurs plusieurs projets en cours pour d’autre chaines national et international.
Sans compter les projets dont je ne peux pas encore parler !
Contact : Vasco Potier – Some Stuff – Montrouge – Tel : 06 19 37 79 19 – E-mail : contact@somestuff.studio – Linked In : www.linkedin.com/company/some-stuff-studio/